Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, prix Pulitzer 1961, est un mystère dans la carrière de Nelle Harper Lee.

Il s’agit en effet de son premier livre et, surtout, de son unique chef d’œuvre. Bon, je vous accorde que le propre d’un chef d’œuvre est de ne pas pouvoir être fabriqué à la chaine et que le succès de ce livre a été tel (40 millions d’exemplaires dans le monde) que la jeune Nelle Harper a peut-être dû se sentir phagocytée par cette soudaine et étouffante reconnaissance.

Il faudra attendre 50 ans avant de voir publié Va et poste une sentinelle , ce deuxième roman tant attendu, où l’on retrouve certains des protagonistes de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur.

La trame

Le roman, publié en 1960, se déroule en fait dans les années 30 à Maycomb, petite ville du sud de l’Alabama, au coeur de l’Amérique ségrégationniste.

Scout est un garçon manqué, elevé par son père, avocat de métier, pétri de sagesse et de bon sens, et par Calpurnia, domestique noire bienveillante et aimante. Le passe-temps préféré de la petite fille consiste à grimper aux arbres et à inventer avec son frère et leur ami commun des histoires.

Les jours et les semaines s’enchaînent, remplis d’insouciance, jusqu’à ce qu’Atticus soit nommé avocat d’office d’un homme noir accusé du viol d’une femme blanche, déchainant les passions en ville, brisant le calme apparent de la communauté et mettant les enfants face aux parts d’ombre des adultes.

Gregory Peck (Atticus Finch) et Brock Peters (Tom Robinson) dans le film To Kill a Mockingbird (Universal-1962)

Alors ?

Le livre est une dénonciation manifeste du racisme et des injustices flagrantes dont est victime la population noire américaine . Il a été publié en 1960, donc à une époque où le système ségrégationniste était encore très présent, notamment dans les états du sud des Etats-Unis. La réussite de Harper Lee consiste à avoir confié la narration de cette histoire à Scout, petite fille innocente donc sans parti pris, qui découvre les inégalités qui l’entourent, les incohérences dans le comportement des adultes et dans la façon de considérer et traiter les uns ou les autres.

Aux Etats-Unis, il se dit que « tuer un oiseau moqueur est un péché » car ces passereaux, cibles faciles et innocentes, ne sont là que pour nous enchanter par leurs chants. Il en est de même pour les être fragiles, enfants, personnes psychologiquement abimées ou socialement rejetées. Les exclure ou les rejeter nous prive de ce qui fait la beauté de ce monde. Et la force du livre et de nous mettre, nous, lecteurs, au niveau de la petite fille qu’est Scout et ainsi de faire corps avec ses pensées et ses réflexions. Une sorte de purification mais aussi un moyen efficace de nous ouvrir les yeux et l’esprit.
Mais assez de grandiloquence. Comme des millions avant vous (et des millions après vous, je pense), allez dévorer le roman de Harper Lee, éloge de la différence sous toutes ses formes.